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Étoiles filantes

20 Août

Mon frère Jacques a allumé le feu de camp. Son petit-fils est allé se coucher au retour du restaurant, brûlé par une journée de courses folles et de jeux de plage. Sa grande sœur de dix ans veille bravement avec nous, sous les étoiles. Ma nièce est d’accord avec moi: c’est bel et bien une aurore boréale qui se déplace en lentes strates blanches dans le ciel noir. Ma petite-nièce a vu une étoile filante. Sa grand-mère lui demande quel vœu elle a fait. Elle ne veut rien révéler. Puis, tandis qu’on marche sur le chemin sombre pour mieux voir l’aurore boréale, la petite chouette nous dit qu’elle a souhaité «une vie heureuse». Que souhaiter de mieux? Quand, à mon tour, j’aperçois une étoile filante, je fais le même vœu!

Le silence

17 Août

Je me réveille à 4:44. Je sais déjà que je ne me rendormirai pas. Sur mon fil Twitter, c’est la débâcle en Afghanistan. Haïti se relève difficilement d’un tremblement de terre. Je suis allée sur la tombe du poète Gaston Miron hier, au cimetière de Sainte-Agathe-des-Monts. J’avais besoin de ses lumières. Il est resté muet, comme de raison, mais ça m’a fait du bien. Le silence est souvent la plus profonde réponse.

Le sentier secret

15 Août

Claude avait dû fermer son compte pour Étrangers en France. La loi venait de changer.. On avait lu et relu la lettre de la Société Générale avant de comprendre ce qu’il fallait faire. Ah! les charmes de la langue de la bureaucratie française! Une fois les papiers remplis, on avait appelé un taxi pour aller poster tout ça au bureau de poste de Val-Morin. Celui de Val-David avait été aboli. Comme il faisait très beau, on avait décidé de revenir au village à pied. C’est comme ça, qu’au bord d’un petit chemin, on était tombés sur un sentier secret.

Astronaute

14 Août

J’ai vu une couleuvre aujourd’hui. C’est la deuxième fois, en 19 ans d’étés passés à Val-David. Le plus étrange, c’est que la première fois, c’était hier, en sortant du parc régional après une longue randonnée: elle était toute petite et toute verte.

Ce soir, Lise et Fernand m’ont invitée à leur feu de camp. Leurs petites-filles, des jumelles de 5 ans, ont fait griller des guimauves. On a regardé passer les satellites en attendant les étoiles filantes. On a chanté un peu: « Un kilomètre à pied ça use, ça use…». Jeanne a déclaré qu’elle serait astronaute.

La nuit des Perséides

12 Août

Assise à l’ombre d’un grand pin, je lis cette phrase dans un carnet de Claude :«Il y a un beau petit lac bleu dans le ciel en nuages». Sur l’intérieur de mon avant-bras court une minuscule araignée transparente que la brise n’arrive pas à déloger. Je souffle dessus, elle s’envole. Le ciel était aussi en nuages pour la nuit des Perséides. Le soleil joue entre les aiguilles du pin, la batterie de ma tablette faiblit à un rythme vertigineux.

La Grande Ourse

11 Août
Suis allée marcher dans la fraîcheur du soir. La Grande Ourse scintillait au-dessus de la petite route sombre. J’écoutais le chant des criquets et je me suis rappelé l’état d’exaltation dans lequel j’ai écrit en 1977 «La Grande Ourse, configuration du désir et de la peur, schéma de la possession». Le texte a été repris dans mon livre «Adrénaline» (Noroît, 1982). C’est probablement ce que j’ai fait de mieux.

Une précieuse ressource naturelle

2 Fév

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Il est encore tôt le matin. La jeune employée à lunettes rentre chez elle. Elle m’envoie la main de loin et continue à chanter d’une jolie voix en traversant la salle déserte. Sa joie de vivre est palpable. La joie de vivre cubaine est une précieuse ressource naturelle de cette île mystérieuse.

Pour célébrer le solstice

21 Déc

Photo via @STONEHENGE

Dans le rêve, je croise la chamane dans la bouche du métro. Elle est en costume: porte ses mocassins, un vêtement cérémoniel, des peaux, des plumes, son tambour d’une main, son hochet de l’autre. Je me rends dans un festival. Elle en arrive. Ils étaient plusieurs à l’aube, pour célébrer le solstice.

L’arbre

19 Déc

Je me lève au coeur de la nuit, alertée par quelque chose d’impalpable qui altère la texture de l’espace. C’est l’arbre. Silhouette noire et massive dans l’angle du salon, le sapin Fraser a déployé ses branches gelées. C’est encore un être sauvage chargé d’un parfum de forêt. Je m’approche doucement, attentive, main levée pour caresser le silence qui émane de l’arbre. Je me rendors sans avoir réussi à décrypter son secret.

Sur la photo prise ce matin, il garde tout son mystère.

Rayons bleus

22 Jan

Tempête

Quant au danger des rayons bleus, l’ophtalmologue avoue qu’il ne sait pas: la documentation n’est pas concluante. Dans le corridor qui mène à la sortie de l’hôpital, je croise un patient en chaise roulante qui se déplace à reculons en chantant à voix basse un Minuit chrétiens qui n’est plus de saison. Une tempête de neige vient de commencer: je fais les cent pas dans la poudrerie en attendant l’autobus Rosemont.

À l’arrêt du collège Jean-Eudes, un bel adolescent sans manteau attire mon attention: il n’est vêtu que d’un sweat shirt et ne porte ni tuque ni mitaines. Aussitôt assis, il enlève son sweat shirt et reste en t-shirt à manches courtes malgré les courants d’air. On peut lire Grupo de Capoeira en bleu sur le t-shirt blanc. Il sort de son sac à dos un exemplaire de bibliothèque du journal d’Anne Frank et plonge dans sa lecture.

En face de moi, une jeune femme à lunettes dans la vingtaine lit Harry Potter et la chambre des secrets. Entre le pratiquant d’art martial brésilien et la lectrice, une jeune femme aux cheveux bleus et mauves joue à un jeu vidéo sur son téléphone intelligent. En rentrant chez moi, je prends une photo de la tempête. Je ne sais toujours pas si je vais commander des verres de lecture qui protègent des rayons bleus des écrans. Il n’y a pas de traces de pas sur le trottoir enneigé.